Du jour ou Carrie et moi avons décidé dans un moment d’ennui de faire un film amateur, d’en écrire le script, et même avant, quand j’étais enfant et que ma mère me récitait des poèmes ou me lisait le Petit Prince, ou quand mon grand père me citait Victor Hugo « Jeanne était au pain sec dans le cabinet noir… » ou « la mort du loup » d’Alfred de Vigny, je commençais peu à peu à construire en moi un monde onirique qui n’a nul besoin de sommeil pour vivre. J’essaie de le sortir et de le mettre sur le papier, mais c’est forcément maladroit par rapport aux images et aux scènes que je vois presque se dérouler sous mes yeux.
Oh ! Comme j’aimerais être Victor Hugo, ou Alexandre Dumas… ou mieux encore, Proust… mais je ne peux pas les atteindre pourtant je le voudrais tant.
J’écris non pour être écrivain, non pour atteindre ce rêve d’avoir le talent de ceux qui ont écrit avant moi et dont j’envie inévitablement l’art, mais pour pouvoir me libérer de moi-même, des histoires qui me hantent et m’habitent, parce que une fois sur le papier, elles ne sont plus à moi, mais à ceux qui peut-être un jour les liront.
Depuis le script, je suis passée au récit, que j’ai changé et modifié encore et encore jusqu’à sa forme actuelle. J’ai tâtonné, trébuché, je suis tombée de nombreuses fois sur le trajet qui a mené au texte présent.
Si l’histoire est la même, la forme et le texte ont profondément évolué au fil du temps, je ne pense pas que ce soit parfait – sûrement parce que je ne suis pas faite pour un travail d’écriture à deux – mais je ne parviendrai pas à l’améliorer d’avantage, il est ce qu’il est, et ses suites seront moins éclopées parce qu’écrites par moi seule.
Ce que j’ai mis dans cette histoire, c’est plus que l’histoire de quelques personnages, c’est moi, c’est une partie de moi, mais seulement en partie, parce que sans doute c’est un peu de Carrie aussi. Les suites (bien plus abouties) seront moi, entières et décomposées, mais moi.
Alors découvrez ce qui en moi est une partie de vous, parce que si vous aimez, c’est votre lecture de ce que j’ai écrit que vous voyez, pas ce que moi j’y ai mis.